Aimer son bébé in utero

Je me suis longtemps demandé si ce billet avait sa place par-ici. Si réellement je n’allais pas être confrontée à un mur de commentaires désobligeants, me culpabilisant davantage face à cette soit-disante « évidence ». Je l’ai pourtant écris, reformulé, effacé.. rien à faire, de toute manière je ne trouverai pas les mots justes.

J’ai toujours voulu être maman.

Tomber enceinte était un réel projet de couple. En quelques jours nous sommes passé de la phase « on en parle » à « on se lance », même s’il s’agissait d’un projet bien plus inscrit dans notre vie de couple auparavant. Lorsque je suis tombée enceinte, j’ai immédiatement ouvert une nouvelle page instagram pour pouvoir suivre d’autres femmes enceintes, plus ou moins au même stade que moi. Afin que nous partagions nos expériences, nos avis, nos conseils et nos histoires.. J’ai tout de suite découvert des personnalités similaires à la mienne, mais également totalement opposées; ce qui rendait nos échanges beaucoup plus constructifs.

Mais dès le départ j’ai sentie un mal-aise de ma part. Bons nombres d’entre elles exprimaient un amour fou pour leurs bébés in utero.. et puis moi, j’étais là avec mon ventre qui s’arrondissait à vitesse grand v et je ne ressentais rien. Ou plutôt tout. En réalité, je ressentais tout un tas de sentiments plus joyeux les uns que les autres, mais aucuns que je qualifierais comme un amour passionnel pour l’être qui grandissait en moi. J’étais face à un questionnement intime qui m’envahissait de jour en jour. Mais pourquoi je ne ressentais pas cela moi aussi ? Est-ce que cela faisait de moi une mauvaise mère ? Allais-je moins aimer mon enfant ? 
Je n’ai jamais osé en parlé, intimement avec vous..  par honte, pudeur et culpabilité.. Mais aujourd’hui je lève le voile. Parce qu’on ne devrait pas laisser ces mamans dans ce doute profond..

Je ne comprenais pas ce sentiment qui m’envahissait.

Avec le recul, je vois bien que ma grossesse n’a pas été vécu de manière épanouissante dès le départ, puisqu’avant de tomber enceinte, j’ai perdu un bébé. Alors le frein que j’ai mis sur mon sentiment maternel était légèrement évident. Mais quand le cap des 3 mois est passé, et même si les 6 mois s’ouvraient à nous, ce sentiment ne me quittait toujours pas. J’allais devenir maman. Ce rôle que j’ai toujours voulu incarner. Et je n’avais pas l’impression d’aimer profondément et infiniment mon bébé comme les autres pouvaient le prétendre.

Et à l’échographie du deuxième trimestre, ça n’a pas été simple. Ce moment qui normalement doit être fabuleux, puisqu’on y découvre le sexe du bébé (en général) a été très mal vécu par le papa et moi-même. Je me suis pris une sacrée claque. Je fabriquais un bébé qui avait une malformation. Comment ne pas culpabiliser ? Comment prendre assez de recul pour se préserver.. J’étais perdue dans mes sentiments. Entre la joie de porter la vie et la tristesse de la lui rendre aussi difficile.

Nous nous sommes appréciés d’une autre manière.

Durant ma grossesse, malgré ce manque inévitable de sentiment d’amour prononcé (au point de le revendiquer sur tous les toits, comme mes copines pouvaient le faire) nous nous sommes apprivoisés à notre manière. Et avec le papa nous avons fait énormément d’haptonomie. Cette technique est une merveille pour pouvoir communiquer avec son enfant in utero. C’est impressionnant à quel point le bébé est connecté avec nous.

Et puis il y avait tout un tas d’autres choses du quotidien que j’aimais faire pour être en phase avec mon fils. Tous les deux jours, je me prenais un petit bain, durant lequel je lui parlais sans arrêt. C’était surtout durant ces doux moments intimes que le petit était le plus communicatif. Et d’ailleurs je me souviens très bien qu’après le diagnostic de la malformation, le p’tit panda n’a pas bougé pendant 2 jours. Je me suis allongée dans le bain et je lui ai parlé en lui disant que si maman était triste ce n’était pas à cause de lui… en quelques secondes j’ai vu mon ventre changé littéralement de forme. Venant blottir sa tête contre mon coeur.

Nous avons également préparé son cocon avec la douceur la plus intense qui pouvait nous habiter. Nous avons tellement aimer chérir ce petit nid d’amour. Chiner, customiser, fabriquer.. était notre quotidien.

J’avais en revanche, un inestimable sentiment de protection, de douceur et de tendresse envers mon fils in utero. Nous développions à notre manière, cette attache charnelle qu’allait être notre relation.

Et puis ce sentiment a disparu.

Quand mon fils est né, je ne pourrais absolument pas donner un ordre de comparaison quant à vous décrire ce que j’ai ressenti, lorsque je l’ai vu, senti, touché et entendu.. tout ceci avait un goût de bonheur ultime, intense et viscéral.. que seules les mamans peuvent réellement comprendre. Je donnais la vie, mais je naissais à mon tour dans le rôle de ma vie. A ce moment là, je me suis déculpabilisée. Parce que j’avais la réponse à ma question.

  • Ce n’est pas parce que je n’ai pas ressenti un amour infini envers ce petit être in utero, que je n’allais pas l’aimer dès son arrivée.

En y repensant, il est évident que j’ai aimé cet enfant in utero. Mais je ne l’ai jamais réellement reconnu. Et cette culpabilité m’a bouffé une petite partie de mon plaisir de porter la vie. Je l’ai juste aimé à ma manière. Voulant intimement garder ce sentiment rien que pour moi.

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Alors j’aimerai rassurer toutes ces futures mamans, qui ressentent ce sentiment caché, enfoui au plus profond d’elles même et qui n’osent pas en parler. Non ce n’est pas une évidence ! Aimer son bébé in utero, n’est pas un critère de « bonne mère » ! On parle de plus en plus du fait de ne pas ressentir de l’amour pour son enfant à sa naissance.. mais tout ceci n’est pas inscrit dans notre ADN. L’instinct maternel c’est bien.. mais dans la réalité c’est autre chose. Le corps change, les hormones travaillent, les sentiments vont et viennent comme la brise. Bref.. chacun gère cela à sa manière.

Pour ma seconde grossesse, je ne pense pas que j’aurai la même approche, parce que j’ai déjà une idée concrète de tout ça. Et je sais qu’à la fin, l’amour règne en maître.

 

Et vous comment avez-vous vécu tout ça ?
Des bisous mes chouquettes

 

31 réponses à “Aimer son bébé in utero”

  1. Tres bel article :)
    Je me reconnais tout à fait, n’ayant pas eu des bouffées d’amour pour mon aîné lorsqu’il était dans mon ventre. J’étais curieuse, intriguée, fatiguée, je me sentais responsable de cette petite vie mais… de l’amour… oui sûrement retrospectivement, mais pas de manière « sensible » :D

    Et même à la naissance, pas de coup de foudre. Bien sûr je l’aimais mon bonhomme, mais de manière encore un peu vague, pas concrète… et puis le sentiment est apparu et s’est construit avec le temps :D Plus je le découvrais, plus je l’aimais :D et ça continue encore maintenant !!

    C’est comme les histoires de couple : chacun son chemin :D

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    • C’est exactement ça ihi je l’aimais mais pas comme toutes les autres qui l’exposait de partout.. j’avais vraiment l’impression d’être pas tout à fait normal.. et pourtant dieu sait que c’est la meilleure chose qu’il me soit arrivé (même un utero) 🙈

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  2. Magnifique article… Chacune vit sa et ses grossesses à sa manière avec son vécu, ses ressentis et ses craintes propres. Ici, ma première grossesse, je l’ai vécu sans la vivre… Je me suis laissée portée sans me rendre compte du bouleversement que cela serait… Je ne pense pas avoir aimé ma fille in utero et clairement, j’ai mis plusieurs jours à investir mon rôle entièrement… Aujourd’hui, j’aime ma fille d’un amour fou et complice… Il faut parfois du temps.
    Pour mon fils, je savais où j’allais, cela a été bien plus évident !
    Ton billet devrait parler à pas mal de mamans ou futures mamans
    Bonne journée

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    • Oui je pense que je ne vivrais pas ma seconde grossesse de la même manière, parce qu’effectivement, je sais où je vais. J’ai hâte !!!
      Il faut du temps c’est vrai, et j’avais vraiment l’impression d’être seule au milieu de tous ces « je t’aime déjà si fort ».. pour moi ce n’était pas assez concret. Même si j’avais une affection immense pour mon bébé..

      Belle journée ma belle !

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  3. Je crois que le sentiment que tu décris est finalement commun à beaucoup plus de mères qu’on ne le croit! et ça ne veut pas dire que l’on n’aime pas son enfant. Mais je crois que celles qui « clament » leur amour pour leur enfant, le font surtout au fait de devenir mères. Pour ma part, j’avais besoin de petits éléments pour mieux visualiser mon bébé et l’approcher (le sexe, le fait qu’elles aient des cheveux visibles à l’écho, leurs coups…), sinon ça restait assez abstrait pour moi (n’ayant pas eu de gros symptomes de grossesse comme des nausées). Après, ce n’était pas du « désamour », mais juste un amour pas encore achevé, qui prendrait toute sa forme avec la naissance. Et comme tu dis, je crois que les difficultés propres à ta fausse couche précédente et à tes difficultés de grossesse ne pouvaient qu’influer de manière plutôt négative sur ta capacité à te projeter déjà et à anticiper l’amour que tu lui porterais. En tout cas ton article est très bien!

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  4. Véritable coup de cœur pour ton article. J’ai aimé profondément ma première fille in utero, et je pensais que ce serait la même chose pour la deuxième. Malheureusement, la peur de la perdre les premiers mois a rendu mes sentiments plus hermétiques. J’avais peur de souffrir. Aujourd’hui, je l’aime c’est certain, mais d’une autre manière que la première, et je pense que je serai totalement libérée lorsque je l’aurai dans mes bras et que j’aurai la preuve que tout va bien.

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    • Oh oui je veux bien te croire.. Ce n’est pas simple de vivre pleinement une grossesse après des difficultés, que ce soit des risques de fausses couches ou de fausses couches tout court. Tu es bientôt à la fin de ta grossesse, j’ai hâte que tu me dises comment l’amour d’une maman fait pour se multiplier <3 Et qui sait, peut-être que pour un petit troisième tu le vivras encore différemment .. (si troisième il y a ! Et non je ne serai pas de celles qui te diront "oh un petit troisième pour tenter le garçon" aha)
      Des bisous ma douce <3

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      • Je t’avoue que je rêve secrètement d’un petit troisième, peut-être pour avoir un garçon je ne sais pas. Mais je ne pense pas qu’un jour notre quotidien nous le permette. Deux enfants, c’est déjà beaucoup de sacrifices, alors trois…! Et j’ai un peu peur de vivre une troisième grossesse compliquée…!

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        • Je peux totalement comprendre ton choix. Moi je rêve secrètement d’un deuxième garçon ihi même si une petite fille me plairait aussi mais par contre avec le papa on ne veut que 2 enfants. Donc la prochaine grossesse sera la dernière !

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  5. Wahou, quel bel article. Je pense qu’il y a plusieurs formes d’amour, et plusieurs façons de l’exprimer, c’est peut-être ça le décalage entre les unes et les autres ? Mais l’exubérance des unes fait culpabiliser les plus discrètes…
    Il me reste 20 jours avant de rencontrer mon Fripouillon, ce que je ressens, j’ai du mal à en dire que c’est de l’amour en effet. Mais je ne saurai pas dire ce que c’est non plus. Alors c’est peut-être vraiment de l’amour, maternel, charnel, mais comme je le découvre, je ne sais pas l’exprimer encore. Je tiens à lui, on va dire, vraiment très très fort. Je veux le protéger, l’embrasser, le dorloter.
    Pas facile de s’exprimer, surtout à l’époque des réseaux sociaux où, il faut bien le dire, l’ultra-démonstration et le culte de la perfection (« regardez comme je fais bien ») règnent en maitre, et c’est vraiment très facile de se sentir « nulle » et culpabiliser en voyant tout ça.

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    • Oh oui je suis bien d’accord avec toi ! Et puis il y en a beaucoup qui se mentent à elles même aussi pour ne pas se sentir à l’écart..
      Moi aussi, j’avais énormément de tendresse envers lui. Beaucoup de douceur à donner <3
      J-20 avant de rencontrer le bonheur ultime ihi Et ne culpabilise pas si tu ne ressens pas un amour fou en le voyant. Zen, il faut du temps à certaines pour s'apprivoiser ! Profite de ces derniers instants qui sont précieux <3 Ils me manquent tant..

      Des bisous ma jolie !

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  6. Tu ne peux que te renfermer après avoir perdu un bébé et c’est plus que normal.
    J’ai aimé mon fils à la première seconde où j’ai réalisé que j’étais enceinte, mais je n’ai pas eu la perte d’un bébé avant donc je ne peux me comparer à toi.
    Beaucoup de mamans qui ont eu une perte avant ou qui ont leur bébé qui a un soucis n’arrivent pas à s’accrocher autant à leur petit être et n’osent pas en parler comme toi et je comprends. ❤️
    C’est un super article, vraiment. ❤️

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  7. C’est un très bel article ma douce, on ne parle pas assez de ce sujet car on voudrait nous faire croire qu’être enceinte c’est l’épanouissement total et que l’on aime son enfant de suite…il n’y pas plus culpabilisant. Comme dans n’importe quelle relation les débuts peuvent être maladroits ou compliqués.
    J’ai eu beaucoup de mal à voir que c’était concret au début de la grossesse si ce n’est aux échos ou lorsque je sentais ces petits coups de pied.
    Toutefois je prenais le temps de lui parler quelques minutes par jour pour commencer à nous apprivoiser, je crois que comme tu dis on l’aime in utero mais on ne se rend pas vraiment compte.
    des bisous

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    • Oui, on ne connait tellement pas ce nouveau sentiment et cette nouvelle sensation.. on a du mal à qualifier l’inconnu, même si les témoignages de nos parents, grands parents.. en attestent.
      Et pourtant, j’ai tellement hâte d’attendre notre deuxième enfant !!
      Des bisous ma douce 😘😍

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